Bruno de Cessole : « Richard Millet enfreint nos tabous »

16 Juin

Chronique littéraire de Bruno de Cessole publiée dans Valeurs Actuelles du jeudi 16 juin

Déjà en proie à la vindicte du petit milieu littéraire et médiatique pour ses libelles féroces sur la médiocrité de la postlittérature contemporaine, Richard Millet ­aggrave une fois de plus son cas avec son dernier opus, Fatigue du sens. Le thème ? Brûlant s’il en est, et bien propre à faire hurler les chiens de garde de la religion de l’antiracisme : le renoncement des Français, sous l’aiguillon d’une maladie de la ­volonté, à leurs valeurs et à leur singularité face à une immigration extra-européenne de masse qui ne peut ou ne veut se plier à l’assimilation.

« Il ne s’agit ici, écrit-il en liminaire de son ouvrage, que de savoir ce qu’il advient du sens de la nation et de mon identité devant une immigration extra-européenne qui la conteste comme valeur et qui, disons-le tout de go, ne peut que la détruire […] parce que l’illimitation de son nombre et son assentiment aux diktats du libéralisme international rencontrent cette terrible fatigue du sens qui affecte les Européens de souche. » Nous sommes, poursuit Millet, entrés dans un monde postdémocratique qui se caractérise par la négation de toutes les valeurs de la verticalité et repose sur « l’universalité ­abstraite d’un mensonge – à savoir que l’homme est bon et perfectible, pour peu qu’on le délivre de l’ethnique, de la nation, du catholicisme, de la race blanche, des traditions européennes, de l’Occident même ».

Affranchi de tout signe d’appartenance, sans mémoire, sans fierté, fatigué de son histoire, mais imprégné des mots ­d’ordre du nouvel ordre moral, le sujet politique contemporain est un ludion individualiste, coupable, repentant, qui n’aspire plus qu’à se fondre dans une humanité indifférenciée et, hédoniste, à jouir de ses derniers privilèges de consommateur. Un peuple, une nation, une religion, une culture, qui abdique ainsi son iden­tité historique et spirituelle se condamne à disparaître purement et simplement.

Tel est le propos, provocateur mais juste, de ce livre, dont la forme – le fragment, l’aphorisme, le discontinu – ne facilite pas la lecture, et qu’on ne saurait confondre avec une diatribe primaire à l’encontre de la figure de l’immigré, lui-même victime d’un phénomène pervers. Les tenants et les relais de la nouvelle doxa antiraciste ne manqueront pas d’exploiter les “failles” de l’auteur : l’aveu sans fard de son hostilité à la démocratie, de sa haine pour la société contemporaine, de son mépris pour les élites démissionnaires, de son antilibéralisme. Et il est vrai que Richard Millet se montre souvent abrupt et maladroit, mais cette rudesse, cette maladresse mêmes sont garantes de la sincérité de ce cri de colère et de douleur d’un homme condamné à l’exil intérieur dans un pays qu’il ne reconnaît plus et qui le nie dans son essence même.

Pour mieux connaître Richard Millet cliquez ici et surtout, lisez-le.

2 Réponses to “Bruno de Cessole : « Richard Millet enfreint nos tabous »”

  1. buiduidan juin 21, 2011 à 3:45 #

    Richard Millet peut-il inspirer autre chose que de la pitié ? L’idée de  » nation  » a disparu avec l’Europe, et n’a plus de sens aujourd’hui, mondialisation oblige. Pas seulement la mondialisation économique, mais celle de l’abolition des distances et des frontières, de l’information accessible à tous, la dilution des élites étant la conséquence du process. La Nation est un combat d’arrière-garde, mené par des hommes au supplice d’une modernité qui ne les (re)connait plus.

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